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Moteurs de recherche : pas de filtrage à partir du terme « Torrent »

28 juillet 2016

Par deux jugements rendus le 8 juillet 2016, le Tribunal de grande instance de Paris a débouté le Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP) dans sa demande visant à imposer aux moteurs de recherche Google et Bing de Microsoft un filtrage des résultats à partir des requêtes sur les noms de trois artistes français couplés avec le terme « torrent ».

En décembre 2015, le SNEP a fait assigner les moteurs de Google et Bing de Microsoft devant le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris, affirmant que ces derniers permettaient aux internautes d’accéder à des copies illicites de phonogrammes ou de vidéogrammes en couplant le nom de l’artiste au mot « torrent » dans la barre de recherches. Le SNEP sollicitait donc auprès du Tribunal de grande instance la mise en place de moyens propres à remédier aux atteintes occasionnées par le contenu de sites internet qui proposent, sans autorisation, des offres de mise à disposition de phonogrammes, comme le prévoit l’article L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Dans les deux affaires, les filiales françaises de Google Inc. et Microsoft Corp. ont sollicité leur mise hors de cause au motif qu’elles n’étaient pas responsables du moteur de recherche, et n’avaient pas de maîtrise juridique sur celui-ci. Or, l’article L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle trouve application puisque les mesures judiciaires peuvent être mises en place à « l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier ». Quand bien même Google France et Microsoft France n’auraient pas les moyens techniques de satisfaire à la demande du SNEP, elles sont un intermédiaire puisqu’elles participent au fonctionnement de l’activité du moteur de recherche, et doivent donc être considérées comme une « personne susceptible de contribuer à remédier » à l’atteinte à un droit d’auteur ou un droit voisin en ligne.

Dans la décision Google, le TGI a considéré que l’action du SNEP n’était pas recevable. En effet, le SNEP n’agissait pas dans l’intérêt collectif de ses adhérents, condition à laquelle est subordonnée l’intérêt à agir d’un syndicat, mais seulement dans l’intérêt de certains de ses adhérents, producteurs des trois artistes en question.

Dans la décision Bing de Microsoft, le TGI a considéré que les mesures sollicitées ne présentaient pas l’efficacité alléguée et n’étaient pas strictement nécessaires. Pour être mises en place, les mesures prévues par l’article L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle doivent être déterminées, proportionnées et spécifiques pour chaque site énuméré, ce qui implique que la demande doit concerner un contenu spécifique et identifiable. Or, la demande du SNEP ne portait pas sur un site identifié mais sur tous les sites accessibles avec la requête du nom de l’artiste accompagné du mot « Torrent », ce qui aurait abouti, si le Tribunal y avait fait droit, à une surveillance générale susceptible d’entrainer le blocage de sites licites. En effet, les juges ont rappelé que le terme « Torrent » n’est pas nécessairement associé à de la contrefaçon, mais qu’il est « avant tout un nom commun (…) qui désigne un protocole de communication neutre développé par la société Bittorrent, qui permet d’accéder à des fichiers téléchargeables licitement ».

Par ces deux jugements, le Tribunal de Grande Instance de Paris rappelle donc que la défense d’un droit de propriété intellectuelle ne doit pas aboutir à une surveillance générale d’internet.

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