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L’état du droit positif de la directive CSRD

28 mars 2025

Le futur du reporting extra-financier prévu par la directive CSRD, pose, depuis quelques semaines, de nombreuses questions. Le 26 février 2025, la Commission européenne a en effet publié ses projets de directive « omnibus » portant « stop the clock » de 2 ans (Omnibus 1) et simplification avec revue des seuils des entreprises concernées (Omnibus 2). De son côté, dans le cadre des discussions du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne (DDADUE), le 10 mars 2025, le Sénat français a adopté un amendement, contraire au droit européen, portant report de 4 ans de l’application de la CSRD ! Dans ce contexte instable, il est de mise d’effectuer une analyse de l’état du droit positif pour s’y retrouver.

Etat du droit positif : obligation de nommer un auditeur de durabilité pour les entreprises de la vague 2

Comme il sera expliqué ci-dessous, l’ordonnance de transposition de la directive CSRD a valeur législative et constitue à date le droit positif, quand bien même des projets de modification de la réglementation sur le reporting extra-financier sont en cours. Les sociétés de la seconde vague de reporting, à savoir les grandes entreprises de plus de 250 salariés, ayant un chiffre d’affaires de plus de 50 millions d’euros et/ou un bilan total de plus de 25 millions d’euros, sont donc, à l’heure actuelle, toujours concernées par l’obligation de reporting à partir du 1er janvier 2026. Elles doivent ainsi désigner en 2025 et avant la clôture de leur compte, leur auditeur de durabilité, sous peine d’un emprisonnement de 2 ans et d’une amende de 30 000 € pour le dirigeant (article L821-6 du Code de commerce). Cette nomination tombera de droit si elles n’y sont finalement plus assujetties du fait d’Omnibus. Si elles le souhaitent, les entreprises peuvent lors de la nomination prévoir une condition suspensive en ce sens.

Rappel des dispositions de la directive CSRD

La directive CSRD, adoptée le 12 décembre 2022, prévoit une obligation pour les entreprises d’une certaine taille de publier des rapports extra-financiers. Cette obligation s’applique de façon échelonnée dans le temps, avec une application progressive aux entreprises en fonction de leurs tailles et leurs natures. Ainsi, depuis le 1er janvier 2025 et jusqu’au 1er janvier 2029, ce sont plus de 50 000 entreprises européennes, selon les dispositions actuelles de la CSRD, qui devront peu à peu se soumettre à l’obligation de publier un rapport extra-financier.

Pour rappel, les directives européennes doivent être transposées en droit national par les Etats membres de l’UE afin de devenir effectives. En France, elles peuvent notamment l’être par voie d’ordonnance prise par le Gouvernement, sur habilitation préalable par le Parlement.

Adoption d’une loi d’habilitation pour transposer par voie d’ordonnance

La possibilité pour le Gouvernement de prendre, par voie d’ordonnance, des mesures du domaine de la loi, est prévue à l’article 38 de la Constitution. Cet article prévoit que le Gouvernement doit toutefois être habilité par le Parlement pour prendre des ordonnances. Dans le cas d’une ordonnance de transposition d’une directive européenne, celle-ci doit ainsi faire l’objet d’une loi d’habilitation par le Parlement avant d’être prise.

Le Gouvernement français, a souhaité transposer la directive CSRD par voie d’ordonnance. Afin qu’elle puisse être prise, cette ordonnance a donc dû faire l’objet d’une habilitation prévue par l’article 12 de la loi n°2023-171 du 9 mars 2023.

L’ordonnance de transposition de la directive CSRD

Après l’adoption de la loi d’habilitation, la directive CSRD a été transposée en droit français par une ordonnance en date du 6 décembre 2023. L’ordonnance est donc venue rendre effectives les dispositions de la directive, obligeant les entreprises de la première vague de reporting à publier un rapport extra-financier à partir du 1er janvier 2025. Cette ordonnance a ainsi abrogé l’article L.225-102-1 portant obligation de publier des Déclarations de performance extra financière, pour créer l’obligation de publier des rapports de durabilité selon les critères de la directive CSRD.

La loi de ratification

Après leur entrée en vigueur, les ordonnances prises par le Gouvernement doivent faire l’objet d’une ratification dans le délai prévu par la loi d’habilitation, à peine de caducité. Dans le cas de la loi d’habilitation de l’ordonnance de transposition de la CSRD, celle-ci prévoyait ainsi un délai de 3 mois à partir de la publication de l’ordonnance au Journal officiel pour que soit déposé un projet de loi de ratification. En l’absence de dépôt d’un tel projet par le Gouvernement dans le délai de 3 mois, l’ordonnance de transposition serait ainsi devenue caduque.

Afin d’éviter cela, le Gouvernement a déposé, le 28 février 2024, un projet de loi de ratification de l’ordonnance du 6 décembre 2023 au Parlement. Cette loi de ratification n’a toutefois jamais été adoptée, ce qui pourrait poser la question de l’éventuelle caducité de l’ordonnance.

Toutefois, depuis une décision du Conseil Constitutionnel en date du 28 mai 2020 (n°2020-843 QPC), à l’expiration du délai fixé par la loi d’habilitation, les dispositions d’une ordonnance peuvent uniquement être modifiées par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. Cela implique pour les ordonnances qu’elles doivent dès lors être regardées comme des dispositions législatives, même en l’absence de ratification expresse par le Parlement. Le seul dépôt du projet de loi de ratification par le Gouvernement le 28 février 2024, dans le délai de 3 mois prévu par la loi d’habilitation, donne ainsi valeur législative à l’ordonnance du 6 décembre 2023.

En ce sens, il serait erroné de conclure de l’absence de ratification formelle de l’ordonnance de transposition que cette dernière est caduque, et que la directive CSRD n’a pas lieu d’être appliquée aux entreprises françaises.

En conclusion a CSRD s’applique toujours. L’ordonnance constitue le droit positif à respecter tant que pas modifié… sans doute prochainement suite à la commission mixte paritaire qui doit se prononcer début avril sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne (DDADUE). A suivre…

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