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Environnement

Faire rimer économie avec écologie

22 septembre 2020

Notre associée, Patricia Savin, spécialisée en Droit de l’environnement et du développement durable, signe une tribune dans la Revue Droit de l’Environnement n° 292 de septembre 2020

Avec 100 milliards d’euros, le gouvernement a pour ambition de relancer l’économie du pays, en fléchant cet argent vers soixante-dix programmes. Dans les grandes masses, 30 milliards sont affectés à la transition écologique, 35 à la relance de l’industrie, 15 à la réduction du chômage et 20 pour la cohésion des territoires.

Sans douter de la cohérence de ce fléchage, la question posée est celle de l’opérationnalité, du pragmatisme et de de la cohérence des mesures financées, les unes par rapport aux autres.

À titre d’exemple, est-ce que la numérisation des territoires et la transition numérique des TPE-PME se feront en prenant en considération le coût écologique du numérique et son véritable impact environnemental ? Ainsi, le télétravail et les visioconférences, dont l’utilisation a été multipliée par vingt pendant le confinement, ont émis énormément de gaz à effet de serre (GES), et ce sans réelle prise de conscience… Pourtant, d’après différentes études, dont celles de l’Ademe, regarder une vidéo pendant une heure génèrerait autant de GES qu’un frigo pendant une année ; les emails non supprimés produiraient en moyenne l’équivalent de 1 000 kilomètres en voiture ; la 4G consommerait vingt-trois fois plus d’énergie qu’une connexion wifi… Ainsi, le numérique émettrait aujourd’hui plus de GES que le transport aérien mondial. Si le numérique était un pays, il serait le 4e plus gros émetteur de GES, derrière la Chine, les USA et l’Inde1. La transition numérique requiert absolument une politique d’usage du numérique partagée, comprise et appliquée, faute de quoi les conséquences environnementales pourraient être catastrophiques. Cet exemple parmi d’autres illustre l’urgence à penser global et systémique. D’où les débats pertinents sur l’écoconditionalité des aides.

Pour sa part, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire2 entend porter une approche systémique, avec une optique de solidarité et mutualisation qui peut bousculer des habitudes… Les décrets à venir viendront éclairer les mécaniques visées et, nous l’espérons, mettre de la cohérence entre les différents objectifs recherchés par cette loi. Ici encore, les aides portées par le plan de relance devront suivre les grands axes de la loi Économie circulaire, faute de quoi l’argent distribué ne servirait pas la transition écologique et la mutation nécessaire du tissu industriel.

En toute hypothèse, la manne financière à venir devra interroger les entreprises sur leur rôle et leur responsabilité sociétale. La loi Pacte du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises a porté un jalon essentiel en ce sens, en modifiant notamment le code civil (article 1833) et le code de commerce et en introduisant la raison d’être et les entreprises à mission3. Pour autant, il convient d’aller plus loin et de réellement réconcilier relance économique et transition écologique, ainsi que le porte le Collectif pour une relance verte4.

Le moment est venu de réellement porter au niveau des comités exécutifs et des comités de direction des entreprises l’impact extra-financier de leurs activités. Une connexion entre les données financières et les données extra-financières doit s’opérer via une « déclaration de performance intégrée »5. Cette déclaration – portée par un collectif d’entreprises, d’associations et d’académiques – permettrait de suivre la réalité des fonds alloués par les entreprises à la transition écologique, en particulier pour celles qui bénéficient d’aides publiques. Une loi est demandée en ce sens.

Ainsi, la transition écologique et la relance verte créent une obligation de penser global, de cesser de penser financier d’un côté et extra-financier d’un autre. Le financier et l’extra-financier des entreprises sont les deux faces d’une même activité. Seul leur rapprochement permettra de faire rimer économie avec écologie.


1. Étude Enerdata, 2017

2. L. n° 2020-105 : Dr. Env. 2020, p. 98, comm. DS Avocats.

3. L. n° 2019-486 : Dr. Env. 2019, p. 199, comm. G. GOFFAUX CALLEBAUT

4. www.relanceverte.fr

5. http://www.oree.org/source/_327.pdf

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