Aux termes de l’article L. 442-2 du code de commerce, « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ».
La Cour de cassation a rendu le 11 janvier 2023 deux arrêts [1] qui apportent des précisions intéressantes sur la question de la revente hors-réseau.
La marque de cosmétique Shiseido, qui distribue ses produits via un réseau de distributeurs sélectifs, constate que des produits de la marque sont vendus sur des plateformes, en l’occurrence Ebay et Amazon et donc hors-réseau, soit directement soit par l’intermédiaire de tiers.
Soutenant que ces ventes portent atteinte à son réseau de distribution sélective et constituent des actes de concurrence déloyale, Shiseido assigne les plateformes en référé afin de faire cesser le trouble manifestement illicite, pour cessation de la commercialisation des produits contractuels en France et paiement d’une provision à valoir sur l’indemnisation du préjudice causé.
Dans le premier arrêt (Ebay), la Cour de cassation juge qu’il résulte de l’article L. 442-2 du code de commerce que « les ventes accomplies par de simples particuliers ne sont pas susceptibles de constituer une violation d’une interdiction de revente hors réseau de distribution sélective ».
Cette solution était prévisible puisque l’article L442-2 n’engage que la responsabilité d’une « personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services », ce qui exclut le particulier.
La Cour de cassation réaffirme ainsi une solution déjà posée en 2012 dans une autre affaire Ebay [2].
La responsabilité d’Ebay est donc susceptible d’être au-moins partiellement écartée, au titre des ventes effectuées par des particuliers.
Toutefois, les captures d’écran produites ne permettant pas de savoir si le vendeur est un professionnel ou un particulier, la Cour de cassation juge que « le trouble manifestement illicite n’était pas caractérisé avec l’évidence requise en référé ».
Dans le second arrêt du même jour (Amazon), la Cour de cassation censure la Cour d’appel, qui avait considéré que le trouble manifestement illicite n’était pas caractérisé et avait donc écarté la compétence du juge des référés, alors même qu’Amazon avait « admis avoir procédé à des ventes directes de produits protégés par le réseau de distribution avant de retirer ces offres ».
Il s’agissait ainsi, selon la Cour de cassation, d’une reconnaissance de responsabilité susceptible de justifier l’octroi d’une provision par le juge des référés.
Notes
[1] Cass com 11 janvier 2023, n° 21-21847 (Shiseido c. Ebay) et n° 21-21846 (Shiseido c. Amazon)
[2] Cass com 3 mai 2012, n° 11-10508