L’actualité du droit des données personnelles est très riche en France, mais également en Europe. Il est réducteur de limiter cette actualité au Règlement Général sur le Protection des Données (RGPD). En effet, les données personnelles sont souvent collectées dans le cadre de services numériques offerts gratuitement aux utilisateurs. Les données d’identification fournies lors de la création de compte sur les réseaux sociaux, pour télécharger une application, ou pour tout autre service deviennent alors le prix payé par l’utilisateur pour accéder au service proposé.
Dans cet environnement numérique, le droit de la consommation devient un outil de choix pour protéger les utilisateurs-consommateurs. C’est ainsi que le Tribunal de Grande Instance (« TGI ») de Paris a condamné Twitter, sur le fondement du Code de la consommation.
En Italie, c’est l’autorité de la concurrence (Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato, « AGCM ») qui a sanctionné le 29 novembre 2018 Facebook pour des faits assez similaires. L’AGCM reproche en effet à Facebook d’avoir collecté des données à caractère personnel sans informer correctement et immédiatement les utilisateurs sur la finalité commerciale de cette collecte.
On retrouve l’approche retenue tant par le TGI de Paris dans la décision Twitter évoquée ci-dessus que par l’Autorité de la Concurrence française dans son avis n° 18-A-03 du 6 mars 2018.
L’autorité de la concurrence italienne refuse ainsi le critère de la gratuité de l’inscription au réseau social comme critère suffisant pour rejeter l’argument de Facebook de ne pas appliquer le code de la consommation. Tout comme le TGI de Paris l’a reconnu, l’autorité italienne analyse la gratuité du réseau comme la contrepartie d’un service et, ainsi, applique le Code de la consommation.
Dans le cadre de sa décision, l’AGCM constate que le réseau social collecte des données personnelles dans un but commercial. Toutefois, les personnes qui s’inscrivent sur le réseau ne sont pas informées immédiatement, ni de manière correcte (exhaustive), sur le lien qui existe entre l’inscription et le but commercial du réseau. L’autorité en déduit que les utilisateurs ne sont pas pleinement informés de la nature commerciale de leur inscription sur le réseau social. Il s’agit donc d’une pratique trompeuse au sens du Code de la consommation italien.
Dans un second temps, l’AGCM se concentre sur le caractère agressif des pratiques de Facebook. Pour se faire, elle constate que les données des utilisateurs sont transmises à des partenaires de Facebook (sites internet ou applications tierces), sans que les utilisateurs n’aient consenti à ce transfert de manière expresse et préalable. Le caractère agressif des pratiques du réseau social se retrouvent dans l’impossibilité qu’ont les utilisateurs de refuser certains traitements sans que cela n’entraîne des limitations dans les fonctionnalités du réseau. Autrement dit, si l’utilisateur dispose souvent de la faculté de modifier ses préférences en matière de données personnelles, les réglages par défaut du site et les conséquences de leur modification ne lui laissent pas de réelle liberté dans ses choix.
L’AGCM condamne donc Facebook à payer une amende de 10 millions d’euros.
Cette décision doit être lue avec le communiqué de presse de l’AGCM du 11 décembre 2018. Ce communiqué est l’occasion pour l’autorité de se prononcer sur la publicité, et notamment sur celle diffusée via ou sur des réseaux sociaux. L’autorité rappelle que les publicités doivent être identifiées en tant que telle. Bien que cela ne soit pas développé dans le communiqué ou dans la décision de l’AGCM, les préoccupations liées à la publicité sous-tendent la volonté de garantir le libre arbitre des utilisateurs-consommateurs en leur permettant de choisir ce qui est vu et/ou consommé, et non plus de subir.
Derrière cette décision italienne, se dessinent des préoccupations sur les données personnelles sous un angle plus économique que celui adopté par le RGPD, et une prise de conscience des enjeux commerciaux et du fonctionnement du marché de la publicité. Preuve que les droits des données personnelles supposent une articulation des droits et libertés fondamentales avec une approche plus générale liée à l’économie.