Un arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 10 mars 2015 condamne le site internet www.artnet.fr à 700 000 euros de dommages-intérêts pour contrefaçon et parasitisme en raison de la reproduction non autorisée de photographies.
Dans cette affaire, un photographe assigne en contrefaçon et parasitisme l’exploitant d’un site internet qui proposait aux internautes un accès payant à des bases de données contenant plusieurs milliers de photographies réalisées pour des catalogues de vente aux enchères. En première instance, le Tribunal de grande instance de Paris avait, dans un jugement en date du 20 décembre 2012, rejeté les demandes du photographe fondées sur le parasitisme et attribué 600 euros de dommages-intérêts au titre de la contrefaçon.
Après avoir retenu la contrefaçon de droit d’auteur, la Cour d’appel de Paris condamne également le site internet pour parasitisme.
Parasitisme avéré
Le parasitisme se définit comme « l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de son savoir-faire » (Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 1999, n° 96-22.457). Contrairement à la concurrence déloyale, le parasitisme n’exige pas une situation de concurrence entre l’auteur de l’acte et la victime du dommage. Contrairement à la contrefaçon, le parasitisme ne dépend pas de l’existence de droits de propriété intellectuelle.
Le parasitisme est donc une sanction différente de la contrefaçon, et les deux notions ne peuvent pas se cumuler pour des mêmes faits. En effet, la jurisprudence refuse de sanctionner une personne doublement pour les mêmes faits délictueux, en l’occurrence ici la reproduction de photographies. Ainsi en l’espèce, le parasitisme sanctionne uniquement la publication non autorisée de photographies qui n’ont pas été considérées par le juge comme étant protégées par le droit d’auteur.
Sur le fondement du parasitisme, une création non protégée par le droit d’auteur ne peut donc pas être exploitée et copiée librement dès lors qu’elle a généré un investissement important. En l’espèce, l’auteur exploitait les photographies en cause et réalisait un important travail d’archivage dont il supportait la charge matérielle et financière. Or en publiant sur internet ces photographies par l’intermédiaire d’un abonnement payant, Artnet tirait profit sans bourse déliée des investissements réalisés par l’auteur des photographies. Un tel comportement a donc été sanctionné sur le fondement du parasitisme.
Parasitisme sanctionné par des dommages-intérêts
La Cour sanctionne le parasitisme par l’attribution de dommages-intérêts correspondant à la réparation du préjudice causé à l’auteur par la publication non autorisée de ces photographies sur le site internet. Ce préjudice est ici estimé à 171 900 euros au titre de la perte de chiffre d’affaire réalisé par l’auteur faute d’avoir pu monnayer son autorisation, ainsi que d’une atteinte à son image et à sa réputation.
En pratique, la sanction du parasitisme n’est efficace, du point de vue du demandeur, que si ce dernier dispose de suffisamment d’éléments pour apporter la preuve de son préjudice et de son chiffrage. Or s’agissant d’une perte de chiffre d’affaires, cet exercice peut s’avérer délicat puisqu’il suppose de dévoiler certaines informations confidentielles de l’activité d’une entreprise. L’action en parasitisme doit donc être mûrement préparée au regard du contexte, en dépit de certaines décisions récentes prononçant de lourdes sanctions pour parasitisme.