Dans un arrêt du 26 janvier 2016, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé qu’un employeur ne pouvait prendre connaissance des courriels envoyés ou reçus par un salarié depuis sa messagerie personnelle sur un lieu de travail.
En l’espèce, un employeur engagé dans un contentieux prud’homal a été amené à produire en justice des emails échangés par une de ses salariées. A l’origine du litige, la salariée a contesté la production de ces emails au motif que quand bien même ils ont été consultés sur un ordinateur professionnel, ils ont été échangés à partir de sa messagerie personnelle.
Pour rappel, l’alinéa 1er de l’article 9 du Code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ». Sur ce fondement, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel « ne peut constituer une faute du salarié un fait relevant de sa vie personnelle » (Soc. 16 dec. 1997, n°95-41.326). Ainsi, l’email personnel échangé par un salarié est à ce titre protégé par le secret des correspondances.
Pour autant, l’employeur a invoqué un arrêt de la même chambre de la Cour de cassation du 19 juin 2013 dans lequel cette dernière avait considéré que les courriels envoyés depuis l’ordinateur personnel d’un salarié, avec son adresse personnelle, puis transférés sur un ordinateur professionnel, sans qu’ils soient identifiés comme « personnels » étaient présumés revêtir un caractère professionnel.
Condamné en première instance puis en appel, l’employeur s’est alors pourvu en cassation. Pourvoi en cassation qui donnera l’occasion à la chambre sociale d’affirmer qu’ « ayant constaté que les messages électroniques litigieux provenaient de la messagerie personnelle de la salariée distincte de la messagerie professionnelle dont celle-ci disposait pour les besoins de son activité, la cour d’appel en a exactement déduit que ces messages électroniques devaient être écartés des débats en ce que leur production en justice portait atteinte au secret des correspondances ».
Ainsi, prenant acte d’un phénomène d’utilisation accrue des nouvelles technologies dans un cadre professionnel, qui tend immanquablement à estomper la frontière entre vie privée et vie professionnelle, la Cour de cassation continue de préciser sa jurisprudence relative à la portée du secret des correspondances des salariés.
A ce jour, le principe demeure que l’employeur est autorisé à accéder aux courriels émis ou reçus par un salarié sur la messagerie professionnelle mis à sa disposition dès lors que ces courriels n’ont pas été identifiés comme étant personnels.